by Théodore Hersart, vicomte de La Villemarqué (1815 - 1895 )
Translation by François-Marie Luzel (1821 - 1895)
L'Héritière de Keroulaz
Language: French (Français)  after the Breton
I Je voudrais être petite colombe blanche À Keroulas, sur le toit : Je voudrais être sarcelle, Sur l’étang où elle lave ses vêtements, Afin de voir ma douce héritière, Qui lave blanc comme le lait…. — Bonjour à vous, ma douce héritière, Pourquoi êtes-vous lavandière ? Assez de servantes sont dans la maison de votre père, Pour vous laver vos vêtements. — Je suis venue laver mon linge clair (fin), Pour passer le temps seulement. Seigneur de la Ronce[1], dites-moi, Pourquoi êtes-vous venu me voir à pied ? Assez de chevaux sont chez votre père, Pour vous porter jusqu’à Keroulas. — J’ai une haquenée blanche, Avec une bride d’argent en tête, Les coins de ses deux hanches dorés, Bonne pour vous porter, héritière. — Seigneur de la Ronce, excusez-moi, Je ne mérite pas d’aller à cheval ; Mais dans un carrosse bien accoutré, Avec huit chevaux pour le traîner ; Je dis un carrosse doré, Sur quatre roues d’argent. — Petite héritière, vous êtes fière, Et le monde parle de vous… — Pourquoi le monde parle-t-il mal de moi, Qui possède cinq mille écus de rente ? Il n’y a pas d’héritière dans la contrée, Qui soit plus riche que moi, Si ce n’est l’héritière de Rosambo, Si elle fait un pas (devant moi), elle n’en fera pas deux ; Si elle en fait deux, pour trois elle ne fera pas, Car son cœur est contristé ; Car son cœur est contristé, Et c’est vous, marquis, qui en êtes la cause. Nul ne marche devant ma face (ne me plait tant) Comme le fils du seigneur de Kerthomas : Nul ne marche avec un aussi bon visage Que Kerthomas vêtu de satin blanc. Je voudrais voir tous mes biens perdus Et moi mariée à Kerthomas, À Kerthomas ou à Coadelès, Ou au baron de Coatgouradès. — J’ai passé par Kerthomas, Et je n’y ai rien vu : Je n’y ai rien vu, Qu’un vieux manoir sans toiture ; Et une mare au milieu de la maison, Bonne aux canards pour prendre leurs ébats. — Tu mens au milieu de ta face ! Tu n’as pas été à Kerthomas. À Kerthomas il y a une salle Dorée jusqu’à terre ; Dorée jusqu’à terre, Faite aux gentilshommes pour s’ébattre ; Capable de recevoir un roi, Eût-il une suite de cinq cents hommes ; Eût-il une suite de cinq cents hommes, Sans en mettre deux dans le même lit. II L’héritière disait À sa mère, en arrivant à la maison : — Je voudrais voir tous mes biens perdus Et être mariée à Kerthomas ; À Kerthomas ou à Coadelès, Ou au baron de Coatgouradès. Sa mère dit alors À l’héritière, quand elle l’entendit : — Ma fille, vous êtes encore bien jeune, Je ne puis pas vous marier ; Votre famille du côté de votre père, Ma fille, ne le trouverait pas bon. III Les pauvres de sa paroisse pleuraient, Et ne trouvaient personne pour les consoler : Et ne trouvaient personne pour les consoler, Si ce n’est l’héritière, celle-là le faisait : — Pauvres de ma paroisse, ne pleurez pas, Venez me voir à Châteaugal, Je donnerai l’aumône tous les jours Et la charité trois fois la semaine. — Vous ne donnerez pas l’aumôme, La charité encore, je ne dis pas ; Mes moyens ne dureraient pas À donner l’aumône aux pauvres. — Sans rien ôter à vos moyens, Je donnerai l’aumône aux pauvres ; Il y a chez mon père une écurie, Seigneur De La Ronce, qui vaut tous vos biens…. Les voilà fiancés et mariés : Elle va à Châteaugal avec son mari. Dur eût été le cœur de celui qui n’eût pleuré, S’il eût été à Keroulas, En voyant la bonne héritière Embrasser les pierres de la maison de son père, En disant : — Adieu, Keroulas, Jamais plus en toi je ne ferai un seul pas ! IV L’héritière disait, En arrivant à Châteaugal : — Apportez-moi un escabeau pour m’asseoir, Si je suis la belle fille de cette maison. Escabeau pour s’asseoir lui a été donné, Et un autre à son mari, auprès d’elle : — Ouvrez toutes grandes les fenêtres, Je vois des pauvres par bandes ; Ouvrez toutes grandes les fenêtres, Afin que je leur donne une partie de mes biens. Quand je regarde encore vers la grande route, Je vois un cavalier vêtu de bleu ; Un cavalier vêtu de bleu, Qui ressemble à Kerthomas… Et Kerthomas demandait, En arrivant à Châteaugal : — Bonjour et joie à tous dans cette maison, L’héritière où est-elle ? — Kerthomas, entrez dans la maison, Afin que votre cheval aille à l’écurie. Un banquet est terminé, Et un autre est commencé ; Et un autre est commencé, Quand le souper sera terminé, vous la verrez…. L’héritière disait À sa petite servante, cette nuit-là : — Délacez-moi mes corsets, Car mon cœur est brisé ! Elle n’avait pas fini de parler, Qu’elle tomba à terre ; Elle tomba à terre, Et mourut aussitôt sur la place. Et Kerthomas (mourut) aussitôt qu’elle, Avant de sortir de la maison !…. Dieu pardonne à leurs âmes, Ils sont tous les deux sur les tréteaux funèbres ; Ils sont tous les deux devant Dieu, Et puissions nous tous y aller aussi !…
Confirmed with François-Marie Luzel, Gwerziou Breiz-Izel. Chants populaires de la Basse-Bretagne Volume I, 1868. Volume II, 1874
Authorship:
- by François-Marie Luzel (1821 - 1895), "L'Héritière de Keroulaz" [an adaptation] [author's text checked 1 time against a primary source]
Based on:
- a text in Breton by Théodore Hersart, vicomte de La Villemarqué (1815 - 1895 ), "Penn-Herez Keroulaz", subtitle: "Ies leon", appears in Barzaz Breiz
Musical settings (art songs, Lieder, mélodies, (etc.), choral pieces, and other vocal works set to this text), listed by composer (not necessarily exhaustive):
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